Épauler les établissements pénitentiaires à maintenir les relations entre les détenus et leurs enfants
Rencontre avec Julie Latou, directrice du centre pénitentiaire Sud Francilien de Réau (Seine-et-Marne)
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Pourquoi mettez-vous tout en œuvre pour aider les femmes et les hommes en détention à préserver la relation enfant-parent ?
Au centre pénitentiaire de Réau, nous considérons que la prison n’efface pas l’amour d’un père ou d’une mère pour son enfant. À la solitude du détenu ne doit pas s’ajouter la destruction de ses liens familiaux. Notre volonté est de préserver les relations enfants-parents, compromises par l’incarcération, et aider ainsi l’enfant à grandir. Au-delà de l’intérêt de l’enfant, il s’agit aussi pour nous de contribuer à maintenir l’autorité parentale.
La personne incarcérée n’en est pas déposséder en raison de sa détention. Cette autorité a même pu être affirmée par le juge des enfants ou le juge aux affaires familiales, notamment quand les parents sont en conflit. Ceci dit, cette relation enfants-parents doit pouvoir s’épanouir à la condition que le lien soit authentique et qu’il corresponde à un véritable souhait de l’enfant. Si ce n’est pas le cas, cela peut être extrêmement destructif.
Comment cette volonté se traduit-elle au quotidien ?
Nous travaillons de concert avec le réseau Relais enfants parents. Leur crédo fait écho à ce qu’écrivait Robert Desnos : « Plus tu t’éloignes et plus ton ombre s’agrandit ». Il aide les enfants dont un parent est incarcéré à faire en sorte que cette ombre ne s’agrandisse pas trop. Concrètement, le Relais enfant parents facilite l’accueil de l’enfant devant l’établissement pénitencier, car si les familles acceptent d’accompagner les enfants jusqu’aux portes de la prison, certains adultes éprouvent de la réticence à y pénétrer.
Par ailleurs, à Réau, deux fois par an, au moment de la fête des pères et la fête des mères, et autour de Noël, nous permettons aux hommes et aux femmes de retrouver leurs enfants. Dans notre gymnase, nous organisons avec le réseau un spectacle, une kermesse, avec pêche à la ligne, concert, goûter, jeux de société, atelier de dessin… Des tables sont installées, et les parents, hommes et femmes, peuvent avoir un moment d’intimité avec leurs enfants mineurs. Par ailleurs, au centre de détention pour femmes, des bénévoles du réseau animent des ateliers de couture, de confection de nounours et de cartes de Noël. Chez les hommes, des ateliers sur le conte sont organisés pour aider les détenus à raconter leur propre histoire à leurs enfants.
Les femmes et les hommes incarcérés sont-il égaux face à cette possibilité de maintenir un lien avec leur(s) enfant(s) ?
On y est presque… Une inégalité demeure en raison d’un nombre plus élevé de lieux d’incarcération pour les hommes. Une maman incarcérée à Réau dont les enfants habitent Marseille aura plus de mal à voir ses enfants, en dépit de l’aide du Relais enfants parents. Les hommes ont plus de choix dans leur lieu de détention, et il leur est donc plus facile de maintenir les liens. L’ouverture de nouveaux lieux d’incarcération pour les femmes va permettre de gommer en partie cette inégalité.